Liaisons n°88
La langue française est malmenée. À chacune de mes promenades dans les villes ou les campagnes, l’œuvre des publicitaires sur les affiches ou en films prouve que la confiance dans les mots anglo-saxons est plus forte pour attirer les acheteurs que le français.
Voitures, électro-ménager, voyages, sont présentés avec le sceau de l’anglomanie.
Pour endiguer le phénomène, nous avons essayé beaucoup de méthodes ; la contrainte de la loi à l’application plus que mesurée ; les motions de congrès ou les articles de presse à l’impeccable rédaction, mais au ton parfois agressif, ou à la forme revêche.
Il manque à notre action pour la francophonie la volonté de savoir pourquoi elle décline.
Sans doute pour des raisons relevant de la connaissance des sons musicaux accompagnant les sons émis par des gorges et des bouches en phase avec le rythme de l’anglais.
Bref, nous pourrions épiloguer sur les mille raisons qui font que journalistes, auteurs, publicitaires s’adressent davantage aux rayons des magasins de la langue anglaise pour faire passer leur message.
Si l’on veut joindre l’utile et l’efficace, il faut définitivement remettre en question nos préjugés et autres attitudes ; il faut se demander si chaque euro dépensé en subventions ou crédit public va permettre à davantage de citoyens de la planète de parler français.
Evidemment, nous rêvons tous de nous faire plaisir, de construire ou reconstruire des édifices où le français a trouvé longtemps avant nous des lettres de noblesse.
La noblesse aujourd’hui, à l’aube du 21è siècle, est dans la circulation et le partage du savoir. Elle n’est pas dans la commémoration et l’incantation.
Ces réflexions, je les ai entendues et nourries grâce à l’apport des associations francophones adhérentes de l’AFAL.
Cautionner des propositions qui n’essayaient même pas d’évaluer les résultats de la moindre dépense publique investie dans la promotion de notre langue, serait un acte qu’aucun citoyen, contribuable français, ou aucun utilisateur du français dans le monde ne nous pardonnerait.
Des dizaines d’associations constituent l’AFAL dans le monde. Elles adhèrent, sachant que, ramifiées et regroupées, elles seront chacune plus efficaces. Leur vigilance sur des dépenses publiques pourrait en pousser quelques-unes à ne plus se reconnaître dans le somptueux et le coûteux.
Mon devoir est d’anticiper et de prévenir pour éviter que notre fédération se voie « embarquée » contre son gré dans des chimères ou des rêves luxueux.
Jacques Godfrain, Président de l’AFAL