AGORA Infolettre 304 – Janvier 2023


ChatGPT : la littérature sera-t-elle « encybernée » ?
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». Si Rabelais nous regarde quelque part, il doit bien rire. Jaune. A peine, le tout nouveau cyberbidule a-t-il déboulé sur les marchés qu’il est devenu la proie des bidonneurs de l’espèce feignante. Tout le monde connaît son nom : ChatGPT-3, nouvel avatar de l’intelligence artificielle. 
Si vous tombez de la planète Mars aujourd’hui, on vous met au parfum : ce robot nous permet de rédiger une dissertation, de pondre un article, d’écrire une lettre de motivation, voire d’amour si affinités, d’inventer une histoire, de créer une chanson, de résoudre un problème de math. Il faut simplement le lui demander en créant un compte sur le site de l’OpenAI son créateur.
Certes, tout n’est pas parfait. Son réseau de neurones artificiels en apprentissage profond ne va pas plus loin que 2021. Donc, si vous lui demandez de rédiger un discours de victoire présidentielle façon Macron 2022, le ChatGPT-3 risque de ressortir celui de 2017.

La spirale de la technofolie
Mais OpenAI promet tout soudain un ChatGPT-4 bien plus performant. Et la spirale de la technofolie allant toujours plus vite, nous pourrons bientôt utiliser un modèle qui rendra impossible d’établir la différence entre un texte rédigé par la machine et un autre par un humain. La littérature sera ainsi « encybernée  ».
Certes, nous aurons toujours la faculté de retrouver les plaisirs culturels du temps jadis où les poètes déclamaient leurs vers dans la rue, les parcs, les tavernes ou chez des amis, où les écrivains lisaient leurs œuvres en public, où le théâtre servait les uns et les autres.
Mais cela ne garantira en aucun cas que le poème que lit Machin n’est pas dû à une Machine. Le retour à l’oralité primitive ne servira donc qu’au plaisir d’une rencontre culturelle, ce qui est déjà un bon point. En revanche, elle ne saurait délivrer un brevet d’authenticité.
Comme toute répression sera inutile, voilà l’écrit sombrant dans l’agonie. Si chacun peut être Baudelaire, il n’y a plus de Baudelaire.
Il se dessine déjà d’autres logiciels et algorithmes qui auront pour fonction de trier entre le bon grain humain de l’ivraie numérique. Sans doute seront-ils vendus par les mêmes compagnies qui auront lancé les cyberinstruments du plagiat !
Mais alors d’autres cyberbidules apparaitront sur le marché pour les contrer et servir à nouveau la cause plagiaire. Et ainsi de suite…

L’auteur-Dieu tombera-t-il de son piédestal ?
L’écrit passera-t-il de l’agonie à la mort ? Pas forcément. Mais le statut de l’auteur-Dieu en sera bouleversé. Nous aurons toujours plaisir à lire les grands poètes et les bons romancier, à se frotter aux textes de philosophes, toutefois sans être certains que ces oeuvres sont bien nées d’un cerveau humain. 
La formule « carrière littéraire » risque fort de n’avoir plus de sens (mais en a-t-elle vraiment aujourd’hui même ?) Et cela découragera bien des vocations. 
Cela dit, rares sont les auteurs qui vivent de leurs écrits à l’heure actuelle. Et aucun poète ne peut s’en payer le luxe.
L’ « encybernement  » de la littérature aura peut-être pour conséquence que les lecteurs se focaliseront entièrement sur l’oeuvre en oubliant l’auteur. Cela dit, parions sur la puissance de l’égo humain pour trouver, cyber ou non, la parade.

Jean-Noël Cuénod
http://jncuenod.com
Journaliste – Tribune de Genève
Poète
Directeur de collection 


Le journal philosophique d’Anouchka Sooriamoorthy-Desvaux de Marigny
Anouchka Sooriamoorthy-Desvaux de Marigny est docteure ès Lettres de la Sorbonne. Elle partage dans ses cours, dans ses articles, dans ses conférences en entreprise et pour le grand public, son amour de la littérature et une vision pratique de la philosophie. Pour en savoir plus : Son site : (…)Lire la suite 

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